Bio

Née en 1974, Maïssa vit et travaille à Paris.

 

Ce sont les assemblages de l’artiste américain Joseph Cornell, découverts à l’adolescence, qui lui ont donné l’envie de pratiquer le collage d’objets et d’images. Vers l’âge de trente ans, après des études de littérature et un bref passage dans l’enseignement peu concluant, elle se met à collecter des objets et les assemble dans des boites vitrées ou entièrement transparentes, en s’inspirant des cabinets de curiosités, qui l’ont toujours attirée pour leur fatras hétéroclite.

 

Elle trouve là un moyen d’apprivoiser de manière rationnelle et esthétique le chaos de la vie et de ses corollaires (mort, maladies, dégénérescences de toute sorte, névroses et angoisses quotidiennes).

 

Entre mises en scène et rébus, elle essaye de donner aux objets qu'elle trouve et transforme –parfois du tout au tout- la force des symboles que l’on trouve dans les contes, dans les rêves et les rites.

Interview

Michel Lagarde: D'où te vient ce goût pour pour les "assemblages" ?

 

Maïssa Toulet: J'ai toujours aimé ramasser des choses par terre... Ensuite il fallait bien en faire quelque chose! Et puis j'ai choisi cette forme d'expression un peu par élimination. J'aurais bien aimé dessiner mais j'en suis incapable, la photo et les films, c'est trop technique pour moi, l'écriture c'est trop périlleux, finalement l'assemblage permet de combiner des images, des objets et des mots avec énormément de liberté et d'éclectisme. Ca me convient très bien.

 

Michel Lagarde: Peut on parler de "cabinet de curiosités" en ce qui concerne ta démarche artistique ?


Maïssa Toulet: Je m'inspire beaucoup des cabinets de curiosités, parce que j'aime l'accumulation, une certaine esthétique de l'étrange et je m'inspire aussi beaucoup des sciences naturelles: j'aime les systèmes de classification, les matériaux naturels, les images des encyclopédies. Donc en ce sens, oui, je suis dans cet univers-là. Mais c'est aussi un point de départ pour aller vers d'autres choses, plus personnelles.

 

Michel Lagarde: Où trouve tu les "matériaux" qui servent de base à ton travail, et comment envisages-tu l'utilisation de ton travail en tant qu'"images illustratives " ou comme "objets " de collection ?

 

Maïssa Toulet: La recherche des matériaux est essentielle dans mon travail. Ce sont eux qui le plus souvent sont le point de départ de mes créations. Je passe des heures à ramasser des choses, dans la nature mais aussi en ville, j'ai toujours le nez par terre, je m'arrête à toutes les poubelles et je vais beaucoup dans les brocantes, les vide-greniers, sur internet et dans certaines boutiques dont je raffole....et puis j'ai des "agents" qui cherchent des choses pour moi. Le moindre animal crevé m'est précieusement confié dans un petit mouchoir, j'ai des amis entomologistes, taxidermistes, brocanteurs, chineurs, sans compter ceux qui me donnent leurs fonds de tiroir...c'est une véritable industrie!
Pour ce qui est de collectionner  mes objets, pourquoi pas? Je sais que certaines personnes les intègrent dans leurs cabinets de curiosités personnels, mais beaucoup de mes travaux sont déjà des petites collections en soi:  je fabrique mes propres museums miniature.
Mon travail est illustratif, dans une certaine mesure, puisque la dimension narrative est souvent présente : je m'inspire beaucoup de matériaux écrits et illustrés (livres scolaires, lettres, cahiers, ouvrages scientifiques, vieilles revues, livres et romans en tout genre-de préférence les pires...), je recombine tout ça pour raconter de nouvelles histoires. La série "Des hommes et des coquillages" que je présente pour cette exposition m'a été inspirée par un poème de Francis Ponge, "Notes pour un coquillage", on pourrait considérer qu'elle en est l'illustration. J'aime beaucoup le titre du recueil dont est tiré ce poème: "Le parti pris des choses". C'est un titre qui m'est très familier, une démarche dont je me sens proche.