Bio

Alain Lachartre est graphiste et illustrateur de formation, diplomé de l'école de Métiers d'Arts Olivier de Serres, il vit et travaille à Paris. Jusqu'en 1986, il est directeur artistique pour différentes agences de publicité telles que Publicis où il y fait ses premières armes.

 En 1986 il publie Objectif Pub, la bande dessinée et de la publicité, hier et aujourd'hui, aux éditions Robert Laffont et Magic Strip. Ce livre très documenté fait connaître les relations étroites qui unissent ces deux univers.

En 1988 il crée son propre bureau de création Vue sur la Ville.

Il installe son style et trouve sa clientèle auprès des Maisons de luxe : Chanel, Veuve Clicquot, l'hotel Ritz, Le Bon Marché...

Pour celles-ci, il conçoit et réalise des éditions de communication à petits tirages, au ton décalé, impertinent et novateur. Sa complicité avec les dessinateurs abouti à des petits trésors de papier, recherchés aujourd'hui par les collectionneurs...

Il publie Traits séduisants aux éditions Scala en 2006, et La valise égyptienne en mars 2012 à l'occasion de l'exposition de ses dessins à la galerie Petits-Papiers Paris en avril 2012.

Entretien

Pouvez-vous nous restituer le contexte qui vous a amené à publier le premier calendrier ?

Alain Lachartre : Depuis quelques années, en parallèle à mon activité de directeur artistique en agence de publicité, je publiais chaque année un agenda très illustré, chic et élégant : Rencontres, Rendez-vous, Ruptures. Je m’intéressais beaucoup au rythme du temps, aux saisons, et à la façon de le traduire en dessin ou en histoires courtes. J’avais également noué des relations amicales avec de nombreux dessinateurs dont j’admirais le travail ou avec qui j’avais collaboré et qui figuraient dans mon livre, Objectif Pub publié en 1986 chez Robert Laffont et Magic Strip. En fondant mon agence-atelier Vue sur la Ville avec Martine Parker, je m’investissais définitivement dans l’édition et l’illustration, tout en conservant un pied dans la communication publicitaire.

Quand est venu en 1990 le moment de choisir la forme de la carte de voeux de l’agence, j’ai voulu retrouver cette notion du temps « à venir », j’ai souhaité instaurer ce rendez-vous annuel avec mes amis en traçant les schémas graphiques de l’année future. Nous avons choisi un large et généreux format, très proche de celui que nous utilisions pour Couleurs et Lumières de Chanel. Aujourd’hui encore c’est un grand espace de libre expression pour les auteurs invités à illustrer chacun « leur » mois en fonction de leur goût, de la saison qui les inspire. Dès le premier jour je leur ai demandé de mettre en scène une ville de leur choix, réelle ou imaginaire. Il faut préciser que, outre le nom de notre agence atelier, le thème de « la ville » était tout naturellement indiqué : notre bureau se situait alors au coeur du quartier du Marais à un étage très élevé : d’un seul regard nous avions presque tout Paris sous nos yeux. La plus belle ville du monde était notre quotidien.

 

Quel est le processus de la création d’une image pour un calendrier VSV et comment sont choisis les auteurs invités au sein des calendriers de l’agence-atelier Vue sur la Ville ?

AL : Cette carte de voeux hors norme a toujours été l’expression de mon goût pour le dessin, et ceci sous toutes ses formes… et elle était aussi destinée à faire découvrir les qualités de Vue sur la Ville. Lors de l’élaboration de la première édition, nous devions avoir l’exigence qu’avec cette idée aussi simple qu’un calendrier - identifiable comme étant émise par notre bureau de création - qu’elle se présente sous la forme d’une édition la plus parfaite possible, avec un maximum de charme, d’émotion et de poésie contemporaine : c’était notre « carte de visite ». Sous le contrôle de Martine, imprimeurs, photograveurs, façonniers et papetiers ont toujours été de parfaits partenaires soucieux de tendre vers la meilleure expression de leur savoir-faire. Voilà donc « l‘écrin » que j’ai proposé aux dessinateurs. En plus de savoir réinventer à chaque fois le thème de « la ville », je leur ai aussi demandé de concevoir leur projet en faisant participer les chiffres des jours, d’intégrer ceux-ci ainsi que le nom du mois dans leurs oeuvres, afin que la page soit totalement de leur main, avec leur « patte », dans leur style. La construction d’une édition de cette nature où les pages ne sont pas interchangeables, est parfois périlleuse : donner « carte blanche » à 12 dessinateurs induit qu’il y aura forcément des surprises ! Malgré le fait que je ne pouvais prévoir quelles allures auraient leurs dessins (c’est le charme du genre), je devais anticiper l’aspect final; pour cela j’ai toujours accordé beaucoup de soins aux placements des dessinateurs les uns par rapport aux autres, évité les juxtapositions de styles, alterné les auteurs confirmés et les jeunes talents, varié les genres, invité des artistes spécialisés dans des univers comme la littérature pour la jeunesse ou bien pour la presse féminine, placé des valeurs sûres à certains mois-clés….

Lors des premières années ce sont surtout les auteurs familiers de l’agence qui ont amicalement apporté leur talent. Puis comme le jeu consiste chaque année à renouveler les intervenants, progressivement les rencontres, les suggestions d’agents d’illustrateurs, les découvertes, m’ont progressivement amené à évoluer vers de nouveaux modes d’expression graphiques.

Réunir douze dessins chaque hiver à l’approche du nouvel An, c’est aussi comme dans un « cahier de tendances », une façon d’annoncer à tous son goût et ses envies de styles pour l’année à venir.

 

Quels sont les privilégiés qui ont pu les recevoir pendant vingt ans, et quel bilan tirez-vous de ces 20 ans d’images ?

AL. : Les calendriers « Vue sur la Ville » sont exclusivement destinés aux amis de la profession, aux clients de notre agence, aux dessinateurs fidèles. Le tirage n’a pas varié : il est de 1 000 exemplaires, et comme toute carte de voeux qui se respecte, il est envoyé par la poste en décembre, enfin… presque ! Depuis quatre ans un « Mister Brown », notre nouvel associé apparaît dans les paysages à chaque mois. Le sens d’ouverture du calendrier à changé: on peut y voir des villes encore plus panoramiques, mais son format est resté imperturbablement le même. Les collectionneurs sont satisfaits: les vingt premières éditions aux couvertures sobres et multicolores des calendriers Vue sur la Ville continuent à s’aligner parfaitement sur leurs étagères ! Au fil des ans, j’ai rencontré ce qui se fait de mieux dans l’illustration, mon esprit et celui de mes partenaires s’est ouvert à des formes artistiques nouvelles. Je me suis rendu compte à quel point la régularité de cette publication entamée il y a vingt ans, à créé des liens autour de nous. L’illustration par le biais de ces éditions est entrée chez nombres de nos clients qui y ont vu au-delà du plaisir de les découvrir, tout le potentiel qu’elle contenait pour leur communication future.

 

Alain Lachartre Mai 2010